Les différentes contraintes mécaniques imposées par le plomb ont bloqué l'évolution de la notation musicale occidentale pendant cinq siècles. Elle s'est certes standardisée et organisée, mais elle n'a pas pu changer et on pense même qu'elle a influencé l'évolution de la musique. Avec l'avènement de l'informatique, elle pourrait de nouveau reprendre la liberté qu'elle avait du temps des manuscrits. Le support électronique est évolutif et la communication informatique approche de l'instantané (il suffit de voir la vitesse à laquelle se propage une nouvelle police de caractères, ou une nouvelle application). Pourtant, même dans le domaine du texte, la typographie informatique n'a cherché jusqu'à présent qu'à imiter, avec plus ou moins de succès, la typographie mécanique ou manuelle, et sous-exploite les nouvelles dimensions mises à sa disposition. Bien que de nouvelles pistes existent et méritent d'être poursuivies comme les polices dynamiques de J. André par exemple [2], l'ordinateur se contente de reprendre les caractères des fondeuses ou des Photocomposeuses. Le jugement d'un historien de la typographie textuelle est valable pour la notation musicale : la typographie entre les mains des ingénieurs n'a pas su tirer profit de tout ce que la technologie nouvelle aurait pu lui apporter de positif [36]. Les signes, que ce soit en musique ou en texte, restent assez proches de ceux des siècles derniers. En réalité, tandis que la calligraphie et la typographie étaient considérées comme des arts et représentaient à elles seules un formidable moyen d'expression, l'écriture informatique d'aujourd'hui prétend être un moyen de communication transparent et neutre n'ayant pour rôle que de véhiculer une information. Mais aucune technique n'est neutre, et la simplification et la normalisation que subit la typographie sont très dangereuses culturellement. Il est nécessaire que l'informatique redonne à la typographie sa liberté d'expression, que ce soit en musique ou en texte.